"George"

George, Alex Gino,
 éd. L'école des loisirs, dès 12 ans.


George, 10 ans, cheveux courts lissés en arrière, vit avec son grand frère Scott et sa maman. Scott est un adolescent typique qui l'appelle "frérot", regarde des films d'horreur, ne se lave pas beaucoup et le charrie comme font tous les grands frères. Sa maman l'appelle affectueusement "Gigi", lui prépare des chocolats froids tous les soirs depuis le départ de son papa et lui assure qu'il "sera toujours son petit garçon et que même quand il sera vieux, elle l'aimera toujours comme son fils".
Seulement voilà, quand George est seule à la maison, elle coiffe ses cheveux vers l'avant comme si c'était une frange et relit les magasines féminins qu'elle cache au fond de son armoire, dévorant les articles sur les tendances maquillage parce que, bien que George soit né dans un corps de garçon, elle s'est toujours sentie fille. George est calme, elle n'aime pas les jeux des garçons ni leur violence et, en classe, sa sensibilité lui vaut des moqueries.  Heureusement il y a sa meilleure amie, Kelly: "Elle avait des tresses et sentait l'orange et le taille-crayon. Elle portait un T-shirt sur lequel était écrit: 99% GÉNIE - 1% CHOCOLAT" (honnêtement, j'aurais adoré qu'on me décrive comme ça!).
Comment faire pour que les autres comprennent quand les mots sont trop difficiles à dire? Une idée s'impose à George comme une évidence: il faut qu'elle joue le rôle de Charlotte l'araignée dans la pièce de théâtre de l'école. Le rôle lui colle à la peau mais surtout "elle avait sincèrement commencé à croire que si les gens la voyaient sur scène en Charlotte, ils se rendraient compte qu'elle était une fille dans la vie aussi".
Un roman tout en subtilité et sincérité. L'auteur nous raconte George en employant la 3ème personne du féminin singulier. On lit donc George comme "elle" se sent et le ressenti de son identité s'impose comme évident et naturel. Le roman est bien ancré dans notre époque où un enfant de 10 ans a la possibilité de faire des recherches sur internet pour essayer de comprendre. 
Les personnages sont justes et attachants. Au fur et à mesure de sa quête, on se rend compte que la famille de George a toujours vu qu'il était différent mais il y a un gouffre entre admettre que son petit garçon soit homosexuel, craindre qu'il soit efféminé tendance drag queen et comprendre qu'il est transgenre.
"- George, je vais être sincère. Tu m'inquiètes... Comprends-moi bien. Être homo, ça arrive. Les enfants se révèlent beaucoup plus tôt de nos jours que quand j'étais jeune. Ce ne sera pas facile mais on s'arrangera. Mais être ce genre d'homo? (elle secoua la tête.) c'est quelque chose de complètement différent.
- Je ne suis pas homo."
Quant à Kelly, elle est décidément la meilleure amie du monde, fraîche, spitante, enthousiaste, authentique, créative, bienveillante, fidèle et aimante. 
Un très joli roman qui a déjà le mérite d'exister dans un désert sur le sujet au sein de la littérature jeunesse (mais je vois que ça change et c'est tant mieux), qui nourrit notre tolérance et ajuste nos idées reçues. Je pense que c'est un roman qui peux changer notre regard.